No man\'s land

No man\'s land

Texte

Voici en quelques épisodes, une nouvelle sur le jeu Tannhauser, uchronie de la seconde guerre mondiale. Ces textes ont déjà été publiés sur le forum officiel du jeu.( après révision par l'auteur du jeu). Les versions ci-dessous sont originales.

Samedi 08 octobre 1949, état de Virginie, base militaire de Warrenton, à 56 miles de Washington. Bureau du Général Hank Denton.

 

 

« Thomas ? »

« Monsieur ? »

« Toujours rien ? »

« Non  Monsieur, désolé »

Le combiné retourna avec un claquement sec dans son logement ; l’homme était nerveux, une certaine impatience se lisait dans ses yeux, mais aussi dans la façon dont il faisait tourner son cigare entre ses doigts. Il porta le cigare à ses lèvres et frotta une allumette d’un bref mouvement, sur le coté de son bureau. La flamme vacillante l’éclaira timidement; l’homme était trapu, de taille moyenne, portant un uniforme beige en partie recouvert d’une trentaine de médailles ; son visage bien portant arborait fièrement une fine moustache parfaitement entretenue, au dessous d’un nez large et bosselé. Sur chacune de ses épaules, trônaient deux étoiles argentées.

Mais où est-il donc encore passé, pensa-t-il en aspirant deux ou trois bouffées du barreau de chaise qui s’allumait lentement.

 

La porte du bureau s’ouvrit d’un coup, personne n’avait frappé ; l’homme sursauta. Un jeune soldat d’à peine vingt ans entra rapidement ; il portait un uniforme également, mais visiblement trop grand pour lui ; d’une nature plutôt fragile, le jeune soldat cachait son visage derrière une paire de lunettes rectangulaire à grosse monture.

« Général ? ! »

« Dites moi, Caporal, mon bureau n’est pas un moulin, j’aimerais que vous frappiez avant d’entrer… »

« IL est là, Général, le capitaine Mac Neal est là… »

« …Hein, enfin, ah, parfait. Faites le entrer et laissez nous, Thom. »

Le jeune caporal parut s’effacer quand le capitaine passa à coté de lui ; mesurant près de un mètre quatre-vingt dix, le colosse entra sans se soucier du caporal, qui referma la porte derrière lui.

Il donnait, au premier abord, l’impression d’un homme négligé, mal rasé, un uniforme passablement usagé, et même troué en plusieurs endroits ; mais en y prêtant un peu d’attention, on devinait qu’il s’agissait d’un homme physiquement et mentalement très solide, cachant en plus un esprit très affûté. Son regard sombre, dès l’entrée dans le bureau, avait déjà observé chaque détail qui composaient la pièce.

« Bonjour, John, content de vous revoir. »

« Général, ça faisait un bail… »

« Je croyais que vous m’aviez oublié ; vous voulez boire quelque chose ? Dites- moi ce qui vous ferait plaisir ; vous préférez plutôt un cigare ?... » Dit-il en lui tendant une boîte en acajou pleine de gros cigares Cubains.

Tout en approchant du petit bar, le colosse en préleva une demi-douzaine et les rangea dans la poche avant de sa veste, il ramassa d’une main la première carafe en cristal qui se présentait, fit sauter de son pouce le bouchon sculpté qui tomba sur le bar, et se servit au trois-quarts un grand tubbler en se retournant vers le général et dit :

« Vous ne m’avez pas fait venir de Baltimore pour me payer un verre et un cigare, Général, j’me gourre ? ».

« Non, bien sûr »

« Je reconnais que votre télégramme m’a intrigué ; vous me demandez de tout laisser en plan et de débouler au plus vite, et tout ça discrètement. »

« Je sais. »

« J’ai dû annuler une mission importante, pour le Général Owen, à Espritos ; ces sales bridés ont investi l’île et sont en train d’y construire un énorme.. » Denton le coupa.

« Je sais tout ça, Owen, j’en fais mon affaire ; pour le reste, avez-vous eu le temps de vous organiser ? »

« Ouais Général, tout est prêt ; il ne me reste qu’un petit détail à régler, pas de quoi fouetter un chat… Alors, c’est quoi, le job ? ».

« Voilà, il y a dix-sept jours, deux Hellcats du fighting squadron 6 basés en république Tchèque, à Liberec, effectuaient une mission de reconnaissance à la frontière Polonaise. Ils ont tout juste eu le temps de nous envoyer un rapport avant d’être abattus par une escadrille de cinq chasseurs, semble t-il, à réactions. »

« ME 262 ? »

« On le suppose ; mais comment avez-vous ces informations, c’est top secret ! » dit-il en haussant le ton.

« C’est moi qui ai dérobé CES plans TOP SECRET, de la base de Lübben, avant de la faire sauter. » il prit une grande rasade de whisky, laissant le tubbler presque vide sur le bord une colonne supportant un buste de marbre.

« Si vous avez eu ces infos, c’est grâce à moi ».

« J’aurai dû m’en douter ; quoi qu’il en soit, ils ont eu le temps de nous communiquer des informations, fragmentaires, mais suffisantes pour nous inquiéter. » il passa la main tenant son cigare dans ses cheveux courts et alla se laisser tomber dans le fauteuil, derrière le bureau. Mac Neal vint s’asseoir en face de lui ; il prit un cigare dans sa poche et le fit aller et venir sous son nez.

« D’après votre message, ça semble plus qu’inquiétant ; que se passe t-il ? ».

« Et bien, vous connaissez le marquis Hermann Von Heïzinger ? » lança t-il en se penchant en avant sur son bureau.

« Ce fils de P…Il m’a déjà échappé une fois, en Afrique. Qu’est ce qu’il a encore fait ? »

« On n’en sait rien, la seule chose certaine, c’est que nos chasseurs, avant d’être abattus, ont pût nous décrire de façon certaine que le zeppelin blindé de Heïzinger faisait route vers le sud de la Pologne ».

Mac Neal arracha le bout du cigare avec ses dents et le cracha par terre.

«  Et ? »

« Et que s’il a des escadrilles de prototypes ME 262 pour le protéger, ça vaut le coût qu’on s’y intéresse, il doit mijoter quelque chose. »

Mac Neal alluma son cigare et après avoir recracher un long souffle de fumée âcre, dit :

« Je comprends bien, mais pourquoi moi ? Vous avez des commandos pour ce genre de mission ; envoyez les types de la Delta Force, ils sont bons là dedans. Et puis, ma mission à Espritos était plus importante, en tous les cas, mieux renseignée que la vôtre. » ajouta t-il en souriant.

Tout en se penchant un peu plus vers Mac Neal, Denton lui fit signe de l’index de se rapprocher et murmura :

« Le problème, John, c’est que j’ai déjà ordonné une mission commando ; d’après nos calculs, on suppose qu’Heïzinger est au château de Ksiaz, j’ai envoyé vingt soldats de l’Alpha Team du Major Kingsley , il y a trois jours, sur place pour mener l’enquête et faire le ménage. »

« Ils ont trouvé ce que trafiquait Heïzinger ? »

« Non ; lors de leur dernier rapport, le Major Kingsley nous annonçait qu’ils étaient tombés dans une embuscade très bien préparée. »

« A votre avis, ils étaient attendus ? »

« Y’a des chances ; depuis, plus de nouvelles… »

«  Il y a une taupe dans votre état major, Général ? »

« Vous comprenez maintenant pourquoi vous êtes ici, Capitaine. Je ne peux pas me permettre d’envoyer d’autres commandos là-bas en suivant les procédures normales, sinon ils vont se faire cueillir comme ils ont cueilli  Kingsley ».

Mac Neal mâchonnait son cigare.

« John, lança t-il en écrasant son cigare dans un cendrier déjà plein,  allez là-bas, entrez dans le château, recueillez toutes les informations possibles et éliminez Heïzinger. Tout cela, dans le plus grand secret. La réussite de cette mission dépend de ça. »

« Ça me va. Vous avez des infos sur le château ? »

Sans avoir attendu la réponse de Mac Neal, Denton avait déjà déboutonné sa chemise, sorti une clé attachée autour de son coup, et ouvrait un tiroir du bureau.

Il jeta un dossier d’une vingtaine de pages devant Mac Neal.

« Tout est là. Je l’ai appelée Opération Tannhaüser »

  Mac Neal parcourut le dossier pendant quelques minutes ; en attendant, le général était retourné près du bar, et revint vers le bureau, un verre dans chaque main.

« Alors », dit-il en tendant un verre.

« C’est maigre… on sait où c’est, c’est déjà ça ! Mais rien sur l’intérieur du château, les forces ennemis présentes sur place, ce qu’ils y font… » Il prit le verre et en avala la moitié.

« Dites moi, John, dites moi ce qu’il vous faut de plus pour réussir cette mission. » Le général allait se rasseoir quand Mac Neal se leva en tendant son verre et en souriant :

« De la chance, du talent et , il engloutit le reste de son whisky, et surtout que vous fermiez les yeux sur tout ce qui pourra se passer dans votre base pendant les trois prochaines heures… »

« Comment ça, quand comptez-vous partir ? »

John Mac Neal se dirigeait déjà vers la porte ; il se tourna vers le général, écrasa son cigare sur le montant de la porte, et dit :

«  Dans trois heures, ça vous va ? Et n’oubliez pas, fermez les yeux ! » Et il ajouta en faisant un petit salut militaire avec deux doigts :

« Denton, à bientôt »

« Bonne chance, John »

Il ouvrit la porte, traversa le bureau du caporal qui sursauta, se mit au garde à vous précipitamment et bafouilla :

« Bonsoir, mon capitaine» alors que Mac Neal ne l’avait même pas regardé.

« Salut gamin. ». et il disparu.

 

Dans le bureau, Denton se rassit dans son fauteuil, prit son verre et tout en buvant doucement, se dit à lui-même : 20ans d’âge, ce whisky et il boit ça comme du petit lait.

 

 A suivre

 

 

 

 

                                                           M Daviaud





04/01/2009
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